Nous débutons 2019 avec ce témoignage de Dame B qui a bien voulu partager son histoire avec notre équipe. « J’espère pouvoir servir d’exemple à toutes mes sœurs » nous a-t-elle confié lors de l’entretien.

Comme vous le savez sans doute, les violences faites aux filles et aux femmes sont de divers ordres. Par le biais de cet article, nous faisons un focus sur les violences au sein du couple.

Obinrin : Comment vous est venue l’idée de partager votre vécu avec notre équipe?

J’ai décidé de témoigner parce que je lis beaucoup de témoignages sur les réseaux sociaux notamment Facebook et je me rends compte que je ne suis pas la seule à avoir subi ce choc. Nous sommes nombreuses mais chaque histoire a sa particularité. Je vous ai donc écrit parce que je veux me libérer et surtout pour inviter les filles/femmes à être très prudentes.

Obinrin : Peut-on alors mieux vous connaître?

Je suis béninoise, âgée de 29 ans et mère de 3 enfants. Titulaire d’une maîtrise en géographie obtenue à l’UAC, j’ai enseigné pendant 2 ans environ l’histoire géographie au cours secondaire. Actuellement, je suis animatrice dans une école primaire de la place.

Obinrin : De l’enseignante du secondaire à l’animatrice dans une école primaire?

On était encore en 2013 et nous habitions Cotonou. Un jour, mon partenaire m’a exprimé son désir de fonder une famille avec moi. Il est bénino-ghanéen et donc toujours à cheval entre Cotonou et Accra où il menait ses activités professionnelles. En partenariat avec un libanais, il avait une boutique de marchandises qui lui marchait bien. En 2015, je l’ai rejoint à Accra sans l’accord de mes parents. A un moment donné, ses activités ne marchaient plus et il m’a tenue pour responsable sous prétexte que je suis la cause de ses malheurs. Il devenait tendu et n’hésitait pas à me donner des coups. Il avait radicalement changé. C’est ainsi qu’un jour, alors que j’étais sortie à la quête d’un emploi afin de couvrir une partie de nos dépenses, il a ramassé mes diplômes de maitrise et de baccalauréat qu’il a brûlés. (Léger sourire)! oui il a brûlé mes documents et a menacé de mettre le feu à mes affaires si je continuais à sortir de la maison.

En 2018, nous sommes revenus à Cotonou où nous résidons désormais dans sa maison familiale avec sa mère et ses sœurs. Il me battait toutes les fois qu’il rentrait et que je n’étais pas là. Je ne pouvais pas compter sur ses sœurs ni sa mère parce qu’elles se mettaient toutes de son côté.

C’est en Août dernier qu’un de ces soirs, il a décidé de me mettre à la porte avec mes enfants et une partie de mes affaires parce que je faisais un job d’animatrice. Je n’ai eu le choix que de rentrer en contact avec mes parents que j’avais aussi quittés pour être avec mon homme et mes enfants. Ma sœur était désormais informée de la situation et devait en informer la grande famille.

A la première rencontre, malgré mon attitude, ils étaient tous prêts à me soutenir. Il a été décidé que je retourne chez lui afin de lui faire des excuses en compagnie de mes parents. Ce que nous fîmes. En présence de mes parents et des siens, il m’a dit des atrocités et a demandé à mes parents de sortir de chez lui mais cette fois sans les enfants. Sur l’intervention de ses sœurs et sa mère, il nous a laissés partir avec les enfants et le reste de mes bagages.

En décembre, il a demandé à voir ses enfants. J’ai refusé de le laisser s’approcher de mes enfants pour éviter qu’il ne me les enlève. Aujourd’hui, il est en fuite parce que j’ai saisi la brigade des mineurs qui nous a orienté vers le juge de famille.

Ça c’est mon histoire. Je ne sais pas encore comment ça finira mais je garde espoir que je m’en sortirai.

Obinrin : Que faites-vous aujourd’hui ?

J’ai demandé le duplicata de mes diplômes que je n’ai pas encore eus jusque-là. Pour l’instant, je me contente de mon travail d’animatrice et je prends soin de mes enfants.

Obinrin : Pourquoi n’avoir pas décidé de mettre un terme à toutes ces maltraitances depuis bien longtemps ?

Parce que je vivais à son crochet et c’est le père de mes enfants. Avec 3 enfants à ma charge, comment allais-je m’en sortir ? Je ne voulais pas plus de problèmes que je n’en avais déjà.

Obinrin : Êtes-vous actuellement dans une démarche de séparation ?

Non, nous n’avons jamais été mariés. Je vivais en concubinage avec lui.

Obinrin : Si vous devriez retourner en 2013, quel choix feriez-vous ?

Je ne le choisirais pas. J’ai été naïve et aujourd’hui j’en subis les conséquences. J’espère pouvoir servir d’exemple pour toutes mes sœurs. Sachez juste faire vos choix.

Obinrin : Êtes-vous à présent soulagée ?

(Sourire)! Un peu. Je ne le serai totalement que quand mes enfants seront en sécurité.

Fin de l’entretien

Les violences au sein du couple sont celles exercées par l’un des conjoints ou les deux. Ces violences peuvent être physiques, psychologiques, verbales, sexuelles, économiques et/ou administratives. C’est le cas de Dame B, qui est entrée en contact avec notre équipe afin d’inspirer d’autres par son histoire.

Les violences, loin d’être un fait nouveau dans notre société, ne cessent de s’accroitre malgré l’existence des lois et le combat que mènent au quotidien les activistes du domaine. Agissons encore et toujours jusqu’à l’élimination des violences autour de nous.

Irmine Fleury Ayihounton

Irmine Fleury Ayihounton

Béninoise née le 12 Avril à Cotonou, je suis Spécialiste en Développement Communautaire et je poursuis actuellement une maîtrise en santé publique à l'Université de Montréal. Je m'investis au quotidien sur les questions de santé de reproduction, de leadership et développement des filles et femmes d'Afrique.

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